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POUTINE À LA SAUCE RUSSE, première
partie
Par Bryan Pettiford
Le 31 décembre 1999, le président de la Fédération de Russie, Boris
Eltsine, annonçait son retrait de la vie politique. Du coup, ce dernier assurait une certaine continuité avec son propre règne
puisque c’est son dauphin désigné, le premier ministre Vladimir Poutine, qui
lui succéda dans une manœuvre digne des intrigues de palais de l’époque
tsariste. L’élection de style
potemkine du mois de mars n’aura donc servi qu’à démontrer les limites et
la relative faiblesse de la démocratisation de l’État russe. Analyse d’une Russie qui, malgré nombre de changements, demeure fidèle
à elle-même.
Chaise musicale politique
Tchernomyrdine, Kirienko, Primakov, Stepachine. Ces noms ne vous disent rien ? Quoi de plus normal puisqu’il s’agit des Premiers ministres limogés par Eltsine avant même d’avoir pu trouver leurs bureaux. En incluant le dernier en liste, soit Poutine, la Russie n’a connu pas moins de cinq Premiers ministres en 18 mois, ce qui pourrait faire dire à certains observateurs que le principe d’alternance au pouvoir n’a pas vraiment servi la cause de la démocratie. Le rôle même de Boris «j’aime la vodka » Eltsine dans la transformation de la Russie en démocratie est remis en question et il est clair que l’héritage de ce dernier ne sera pas sans taches. Mais quelle âme est sans défaut se demandait Rimbaud ? En fait, si la plupart des Russes reconnaissent le rôle de Eltsine dans la chute du régime soviétique, il ne s’en trouve pas beaucoup pour louanger ses accomplissements post-soviétiques. En quelques années, le PIB par habitant a chuté de 2000 dollars US pour se fixer à 4370$ et l’ensemble de la Russie semble bien plus mal en point qu’il y a une dizaine d’années. Avec de telles données, il n’est pas tellement surprenant de constater une indifférence généralisée de la population envers la chose politique. Pourtant, l’arrivée de Poutine à la présidence a semblé donner un regain de vie à une charge qui en avait bien besoin tout en stabilisant autant que possible le gouvernement en mettant fin au jeu de la chaise musicale.
Que de jeunesse !
Oui, vive la jeunesse, la tendre jeunesse ! Même si cette jeunesse est âgée 46 ans, ce point n’est qu’un détail. Après toutes les tribulations de Boris « Smirnoff » Eltsine, un président en santé fait toute une différence. En outre, le nombre de scandales politico-financiers de celui-ci n’a eu d’égal que le nombre de pontages qu’Eltsine a subit durant cette même période. Par conséquent, la jeunesse, c’est aussi la modernité, l’avenir, le renouveau, la mondialisation, les technologies toutes plus inutiles les unes que les autres et c’est aussi Vladimir Poutine. Ce « jeune homme », qui a bien voulu se sacrifier à un si tendre âge pour la grandeur de la Russie, n’a pas perdu de temps pour s’imposer comme le véritable homme fort de la scène politique. Limogeages, arrestations, réformes par décrets, discours rigides et lutte impitoyable contre les terroristes (qui sont tous des musulmans par ailleurs et souvent tchétchènes de surcroît), voilà le programme de la nouvelle famille au pouvoir. Oui, car les Russes ont un sens inné de la famille, surtout en politique. Alors que la famille eltsinienne n’a pas terminé de faire ses bagages, les pétersbourgeois arrivent en trombe et réclament leur part du gâteau. L’arrivée au pouvoir d’un nombre important d’anciens tchékistes[1] tels que Patrouchev (directeur du FSB), Tcherkessov (représentant plénipotentiaire du Nord-Ouest) ou encore Ivanov (secrétaire du Conseil de sécurité) laisse envisager un renforcement considérable de la présidence. Bien que la Russie soit déjà une république présidentielle, les chances d’une dérive autoritaire sont très réelles, les hommes liges de Poutine étant aux postes-clés et effectuant les volontés de celui-ci sans broncher. En fin de compte, la Russie de Eltsine est devenue celle de Poutine. La suite dans la prochaine parution [1]
Le terme « tchékiste » dérive du nom Tchéka, cette
organisation, fondée par Lénine (1917), était la police politique du régime
bolchévique. Elle fut remplacée
par la Guépéou (1922), puis le NKVD
(1934), lui-même précurseur du KGB et donc du FSB actuel. |